| Tribune Avril 2023

Tribune Avril 2023

Réparons l’environnement, pas les femmes !

Par Manon Le Naour, Directrice du développement d’IPRH Consultants, Formatrice en management, communication, vente, ressources humaines, auditrice. Coach certifiée.

La mixité femmes-hommes dans les instances dirigeantes des organisations est un sujet d’attention depuis plus de 15 ans, pourtant les progrès restent très lents et incertains. L’erreur est de penser qu’il s’agit d’un problème « de femmes ». Ce n’est pas le cas, ou pas seulement.

C’est surtout et d’abord une question de bonne gestion des talents, une compétence que les dirigeant(e)s d’aujourd’hui et de demain doivent comprendre et s’approprier. Au cœur du problème se trouve la vision de la place de la femme et la responsabilité de la famille qui lui incombe « historiquement » à travers la maternité. Le monde de l’entreprise s’est construit avec des hommes, pour des hommes, qui n’ont pas eu pour habitude de mettre en concurrence leur rôle de pères et leur carrière. Rien d’étonnant alors à ce que le parcours soit inadapté pour celles qui (le plus souvent encore) doivent combiner une double ou parfois triple charge. Le modèle de réussite n’a pas été conçu pour les femmes et il ne marche pas pour toutes celles et ceux qui ne rentrent pas dans « le moule historique ».

Il n’y a pas de solution miracle mais nous savons déjà que les progrès ne se font pas « naturellement » ; le chemin est tellement inscrit dans un changement de perspective et de culture qu’il nécessite des actions et points d’inflexion à tous les étages, de la part des gouvernements comme des entreprises.

Mettre en place des processus équitables dès le recrutement

Pendant longtemps, les entreprises ont privilégié les programmes de coaching ou les formations au leadership visant à aider les femmes à « naviguer » dans un environnement qui ne leur était pas favorable, et qui ne prenait pas en compte les contraintes auxquelles elles sont confrontées. Ces formations sont utiles, bien sûr, pour renforcer la confiance en soi et l’affirmation qui parfois, on le sait, manquent aux femmes. Mais les capacités et le leadership des femmes ne sont pas le problème. Le défaut à réparer est dans le système, un modèle biaisé, un terrain de jeu inégal, souvent plus exigeant pour les femmes. Il s’agit donc moins de « réparer les femmes » que de « réparer l’environnement » : mettre en place des processus équitables, neutralisant les biais dans les recrutements et promotions ; éliminer la stigmatisation et la discrimination liées à la maternité ; apporter la flexibilité et le support dont les femmes et tous les parents ont besoin pour combiner une carrière exigeante et des responsabilités familiales.

Changer la vision du leadership et de la performance

Il faut permettre à toutes celles et ceux pour lesquels le modèle « dominant » ne convient pas de pleinement contribuer et réussir. Il s’agit avant tout de changer les codes, la vision du leadership, la façon dont nous travaillons, dont nous pensons la performance. Finalement, il n’est pas question de créer des exceptions et mesures pour les femmes dans un monde difficile, mais plutôt de rendre ce monde résolument meilleur pour toutes et tous, y compris les jeunes générations dont les aspirations bousculent aujourd’hui les codes.