Quand l’improvisation s’invite en entreprise.
Par Manon le Naour, Directrice du Développement d’IPRH Consultants, Formatrice en management, communication, vente, ressources humaines, auditrice. Coach certifiée.
Pratique réservée aux comédiens de théâtre,l’improvisation fait de plus en plus son entrée au sein des entreprises dans les séminaires, les team-building, le coaching d’équipe ou la formation. Les prescripteurs actuels sont majoritairement des directions liées à de l’opérationnel ou des projets. Environ 10 % des ateliers d’improvisation sont demandés par les RH mais ce chiffre tend à grandir. Quelles sont les raisons qui poussent les entreprises à adopter ces nouvelles approches ?
Fédérer l’équipe
Les ateliers d’improvisation permettent de fédérer rapidement les collaborateurs autour d’un jeu. D’une durée de 10 minutes à une demi-journée, ils s’inscrivent parfaitement dans une journée de travail ou de formation. Ils permettent souvent de découvrir l’autre de façon ludique et originale et de créer un moment de cohésion grâce aux rires partagés.
Développer la communication et l’écoute
La communication est un des enjeux principaux du fonctionnement d’une équipe. Les exercices d’improvisation vont permettre de développer l’écoute enrichie : écoute dynamique qui fait appel aux autres niveaux d’écoute (active, empathique, totale et systémique). Le but étant de faire émerger le sens et une orientation : en se basant sur les mots de l’autre, les participants créent au fur et à mesure l’histoire.
Lors d’un atelier, le participant doit être concentré et attentif aux mots employés par ses collègues afin de rebondir rapidement. Nicholas Audoly, Président chez EN-JEUX et comédien-formateur dans l’école d’improvisation toulousaine La Bulle Carrée, s’appuie sur des techniques d’improvisation dans ses accompagnements professionnels et formations. Il explique que : « Les personnes sont souvent dans un mode de pensée anticipée, déconnecté de l’autre, soit dans du jugement passé, soit par anticipation de l’avenir. L’improvisation va leur permettre d’être dans l’instant présent, et de travailler des enjeux d’organisation tout en associant une forme de légèreté à la mise en mouvement ».
Le rapport à l’erreur
L’improvisation permet d’appréhender la notion de risque. « On ne va pas mourir sur scène » et « le ridicule ne tue pas » sont des phrases fréquemment évoquées par les comédiens. Dans les entreprises, cette notion est peu développée et la pression, souvent présente, inhibe les initiatives ou les idées nouvelles. « Beaucoup d’exercices sont faits pour forcer les personnes à prendre des risques, voire à se tromper, l’objectif étant d’oser de proposer des choses et de fructifier les soi-disant “erreurs” », relate Nicholas Audoly. Les participants vont prendre des initiatives, sans craindre le jugement ou de se tromper, puisque le jeu incite à prendre des risques.
Libérer la créativité
L’improvisation invite au travail d’équipe et s’appuie sur les principes de co-construction et de créativité collective. Les seules limites sont celles de l’esprit ! Bien entendu, l’animateur garantit un cadre bienveillant et donne une dynamique positive.
Être dans l’action
Les ateliers d’improvisation sont des formidables « Icebreaker» et « Energizer ». En effet, ils permettent de faire connaissance rapidement en s’amusant et donner du rythme à un moment de la journée. Ce sont des véritables amplificateurs d’énergie en favorisant la spontanéité des participants. A travers une histoire de personnage ou de situation, les participants sont en mouvement. Dans les entreprises où l’utilisation de la tête est privilégiée, le rapport au corps et aux émotions peut être très disruptif ! En effet, ce n’est pas tous les jours qu’on se transforme pour les besoins d’un atelier en Samouraï ou Maori ! Néanmoins, l’improvisation est un outil plus puissant qu’un simple « booster ».
Ces exercices sont souvent révélateurs d’une dynamique d’équipe et permettent de donner de la matière d’analyse en d’accompagnement ou de coaching d’équipe. En se basant sur l’atelier effectué, l’animateur ou le coach va accompagner le groupe dans sa prise de conscience des états de fait et sa volonté d’atteindre un état désiré en mettant en place un plan d’action co-construit.
L’improvisation apporte beaucoup aux collaborateurs quand elle est judicieusement menée. Afin de permettre à chaque participant d’être à l’aise lors de l’atelier, l’animateur s’enquiert au début de la séance de l’état d’esprit de chaque individu en proposant, par exemple, une météo du jour suivie des attentes de chacun. Cette introduction permet de détecter les craintes éventuelles, les contraintes physiques, l’énergie du groupe, et de s’y adapter tout au long. Dans cette phase de prise de connaissance avec le groupe, l’animateur va également poser le cadre en co-définissant les règles de tout l’atelier : bienveillance, autorisation d’échouer, autorisation de ne pas faire, non-jugement et écoute (de soi et des autres).
Lors d’un atelier d’improvisation, les exercices sont soigneusement choisis de manière à donner confiance de façon crescendo, notamment pour permettre aux plus introvertis de se sentir à l’aise.
L’animateur doit savoir encourager et également réguler les interventions (si besoin des plus extravertis) pour permettre la contribution de tous. S’il y a dérive individuelle ou collective, l’accompagnateur peut se référer au cadre préétabli en amont et consulter le groupe ou l’individu. Mais généralement, le groupe lui-même s’autorégule pour apporter l’harmonie et permettre un beau moment de partage !