| Tribune Octobre 2024

Tribune Octobre 2024

« Génération Z : comment motiver et fidéliser les jeunes collaborateurs (trices) pour réduire le turn-over ?  » (Episode 2) *

* Episode 1 : Voir Tribune de Juillet 2024

Par Patrick Rasandi, Fondateur et dirigeant d’IPRH Consultants, Formateur, coach senior certifié, Membre du Bureau du Syndicat des Métiers du Coaching.

Grande démission, démission silencieuse ou bruyante… La Gen Z n’hésite pas à changer d’emploi, et elle le fait savoir sur les réseaux sociaux. 48 % des salariés de cette génération pensent à quitter leur emploi dans l’année à venir, selon une étude récente. Comment comprendre les besoins profonds de la Gen Z ? Comment adapter son style de management pour contribuer à leur épanouissement professionnel ?

Les Z représenteront près d’un tiers des salariés d’ici 2030 : en tant que manager, il devient donc nécessaire de vous adapter et de trouver des moyens de fidéliser cette génération. Dans mes accompagnements sur le management intergénérationnel, je constate que ce sujet est un vrai défi pour toutes les entreprises, quels que soient leur taille et leur secteur d’activité.

Une génération connectée et plus sociale que ses aînés

Pour bien comprendre la Gen Z, revenons aux bases. Nés à la fin des années 90 et au début des années 2000, les Zoomers, comme on les appelle, ont été bercés par la technologie dès leur plus jeune âge. Ils ont toujours eu un smartphone ou une tablette à portée de main. Bien sûr, cela leur permet d’être constamment informés, mais aussi de rester en contact permanent avec leurs proches. On entend souvent dire qu’ils sont accros aux écrans, mais j’y vois plutôt le signe d’un besoin profond de coopération et d’appartenance à des communautés.

Autre particularité : cette génération est marquée par l’anxiété. 7 jeunes sur 10 en souffrent, selon une étude Ipsos. En plus des crises successives (économiques, politiques, sanitaires…) qu’ils ont toujours traversées et qu’ils continuent à rencontrer, leurs aînés leur rappellent sans cesse que le monde va mal. Peut-on, dans ces conditions, leur reprocher de chercher la liberté dans le digital ?

Comprendre les besoins profonds des Z pour les fidéliser

La génération Z bouscule nos habitudes managériales. Pourtant, ne nous y trompons pas : leurs besoins fondamentaux restent les mêmes que ceux des générations précédentes. Ces besoins, identifiés par Eric Berne, fondateur de l’Analyse Transactionnelle, ne connaissent ni frontière physique ni temporelle. Reconnaissance, structure, stimulation : ce trio reste inchangé. Par contre, ces besoins s’expriment d’une manière totalement inédite à chaque génération. C’est cette expression qu’il faut comprendre pour établir avec nos fameux Zoomers une relation de confiance qui vous permettra de les fidéliser dans vos équipes et organisations.

Commençons par la reconnaissance. Bien plus que leurs aînés, les Zoomers sont en quête d’unicité, et ont besoin d’être reconnus non seulement pour ce qu’ils font, mais pour qui ils sont. Cette génération, qui a grandi avec les réseaux sociaux, a l’habitude de se mettre en scène, de cultiver sa singularité. Dans le monde professionnel, cela se traduit par un besoin de reconnaissance personnalisée. Ils attendent de leurs managers qu’ils voient au-delà de leur simple contribution professionnelle, qu’ils reconnaissent leurs valeurs, leurs aspirations, leur personnalité unique. C’est un changement de paradigme pour beaucoup de managers habitués à une reconnaissance plus formelle et standardisée. Une clef ? Mettez en place des rituels très réguliers de feedback.

Passons à la structure. On entend souvent que les Zoomers ne jurent que par la liberté. C’est vrai, sauf que la liberté n’existe pas sans cadre – sinon, c’est l’anarchie. Les Zoomers ont besoin d’un cadre, mais d’un cadre co-construit, flexible, qui leur donne le sentiment d’être impliqués et responsabilisés. La structure pour les Zoomers, c’est avant tout la clarté des attentes et la transparence des processus. Ils veulent comprendre le « pourquoi » derrière chaque règle, chaque décision. Cette génération, habituée à remettre en question l’autorité, n’acceptera pas un cadre imposé sans explication. Le défi pour vous, managers, est donc de créer une structure suffisamment souple pour s’adapter à leurs besoins de flexibilité, tout en étant assez solide pour garantir l’efficacité opérationnelle.

Enfin, la stimulation. On a tendance à voir les Zoomers comme des hyperactifs, incapables de se concentrer longtemps sur une tâche. C’est une vision réductrice. En réalité, ils ont une soif d’apprendre insatiable. Nés dans un monde en constante évolution, ils ont intégré le changement comme norme. Ils veulent développer leurs compétences en permanence, se réinventer sans cesse. Pour eux, la stimulation passe par la variété des tâches, les défis réguliers, et surtout, l’impact visible et rapide de leur travail. Le manque de stimulation est d’ailleurs une cause fréquente de démission chez cette génération. En tant que managers, vous devez donc repenser la manière dont vous concevez les missions et les parcours de carrière pour répondre à ce besoin de stimulation constante.

Face à ces besoins qui s’expriment de manière si particulière, vous devez dire adieu au management vertical classique et embrasser la posture de leader-coach. Cette approche, basée sur l’écoute active, le questionnement puissant et la reformulation, permet de créer un espace où les Zoomers peuvent exprimer leurs besoins et trouver leurs propres solutions. Elle favorise leur autonomie tout en leur offrant le soutien dont ils ont besoin.

En définitive, comprendre et répondre à ces besoins de reconnaissance, de structure et de stimulation est la clé pour manager efficacement la génération Z. Cela demande de l’adaptabilité, de l’ouverture d’esprit et une remise en question constante de nos pratiques managériales. Mais c’est aussi une opportunité formidable de repenser nos organisations pour les rendre plus agiles, plus inclusives et plus performantes.

Le management intergénérationnel est une exploration passionnante. Vos expériences passées sont votre carte, mais le terrain a changé. À vous de mettre à jour cette carte, d’adapter votre approche tout en gardant le cap. C’est un défi, certes, mais c’est aussi une chance incroyable de créer des équipes diversifiées, dynamiques et prêtes à relever les défis du monde de demain.

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Article BONUS / Conseil coaching rédigé par l’équipe d’IPRH Consultants !

Thème : J’aurais dû répondre ça ! » : comment développer votre sens de la répartie au travail ?

Attaques personnelles de la part d’un manager, conversation politique avec un collègue… L’équipe vous explique comment se sortir intelligemment de situations embarrassantes au travail, grâce à un sens aiguisé de la répartie.

Tout le monde rêverait d’avoir une répartie de killer. Celle qui permettrait de clouer instantanément le bec à son détracteur, et de sortir la tête haute d’une situation complexe. Mais, souvent, nous ne disons rien et nous ruminons jusqu’à ce que la phrase teintée de regret « Ah, j’aurais dû répondre ça ! » nous vienne à l’esprit.

Ce sens de la punchline bien placée est un exercice à travailler, mais « la répartie, ce n’est pas que la capacité à se défendre oralement face à une remarque désagréable, nuancons-nous. La répartie, c’est aussi le caractère interactif et banal avec les autres dans le quotidien. C’est la capacité à réagir instantanément et justement. »

D’après l’enseignant en rhétorique à l’université Paris-Saclay, répondre « justement » à son interlocuteur signifie « obtenir l’effet recherché. Si l’objectif fixé était de le faire rire et que, finalement, je le blesse, alors ma répartie était peut-être rapide, mais n’était pas juste. » Cette arme oratoire est donc à manier avec précaution, notamment dans le contexte professionnel.

Nous identifions 4 situations plausibles, et expliquons comment les appréhender au mieux.

1. Rétorquer à une attaque professionnelle

En règle générale, lorsque nous recevons une attaque verbale, liée à notre travail, de la part d’un manager ou d’un collègue, « nous sommes énervés«.  Avant de détailler : « Nous avons une réaction émotionnelle, alors qu’il faudrait déconnecter les propos de soi-même. Il ne faut pas confondre ce qui relève de notre travail et de notre personnalité. Il faut chercher à comprendre calmement ce qui se cache derrière l’invective en sortant d’une logique de l’affrontement. Il s’agit de poser des questions claires pour obtenir des réponses objectives, et ainsi trouver avec son interlocuteur des solutions à un problème. »

2. Se défendre face à une attaque personnelle

Si l’attaque verbale est plus personnelle (sexiste, homophobe, ou encore raciste), il existe deux grands types de réactions afin de ne pas tomber dans l’agressivité. « L’auto-dérision est redoutable », selon l’auteur, qui donne un exemple : « Si un collègue-homme dit à la machine à café à sa collègue-femme « Ah ben dis donc, les femmes paient leur café maintenant », la victime de sexisme peut répondre « Eh oui, les femmes ont le droit d’avoir un compte bancaire depuis le mois dernier, tu n’étais pas au courant ? »« .

L’autre possibilité est de feindre l’ignorance, l’incompréhension. « Là encore, l’idée est de demander à la personne de développer sa pensée, de manière subtilement ironique, afin que l’interlocuteur clarifie ses propos. Ce processus risque de le mettre mal à l’aise, et ainsi de lui faire prendre conscience par lui-même du caractère déplacé de sa remarque«. Dans l’exemple précédent, la victime peut rétorquer : « Qu’est-ce qui te surprend dans le fait que les femmes paient leur café ?«

3. Esquiver des sujets tabous

Dans des contextes inflammables, comme ces dernières semaines où les conversations politiques se sont immiscées dans la sphère professionnelle, la répartie est d’autant plus utile. Ces sujets d’actualité sont inévitables au travail, car ils constituent une partie de la vie quotidienne des travailleurs, qui sont aussi des citoyens en dehors de l’entreprise. Mais, ces sujets sont sensibles et ne doivent pas mettre en péril les relations de travail qui, elles, s’inscrivent dans le long-terme. « Si un salarié évoque ce sujet, surtout lors de temps informels, comme la pause café ou le déjeuner, c’est qu’il est préoccupé par ce sujet, qu’il a peut-être une crainte émotionnelle, qu’il a besoin d’en parler«.

Aussi, l’une des solutions pour aborder ces sujets politiques – ainsi que tous ceux considérés comme « tabous » au travail – sans se mettre en danger quant à ses opinions personnelles, c’est « de faire parler l’autre pour connaître son positionnement ; de voir si on est d’accord ou pas d’accord ; de répondre à la question par une autre question ; de recourir à une phrase générale qui ne dit rien sur son ressenti profond ; ou de s’effacer derrière le groupe si cette conversation a lieu avec plusieurs personnes«.

4. Convaincre de la pertinence d’un projet

Enfin, lorsqu’il s’agit en tant que salarié de défendre une idée, un projet qui tient à cœur devant ses collègues et/ou ses supérieurs hiérarchiques, « le niveau de stress peut être élevé, car l’enjeu est important«. Aussi, si des objections sont formulées, « l’important n’est pas d’apporter les réponses les plus solides intellectuellement, mais les plus impactantes émotionnellement sur la personne qu’on cherche à persuader. L’idéal est de connaître ses opinions, ses intérêts, ses sensibilités. La préparation de cette prise de parole est le nerf de la guerre, ainsi qu’un bon entraînement«, tout en admettant que ce n’est pas toujours possible de bien connaître son/ses interlocuteurs en amont.

C’est pourquoi, dans des contextes similaires, l’équipe IPRH recommande la technique argumentative AEI (Affirmation, Explication, Illustration). C’est-à-dire, formuler une réponse en une phrase, avec un élément central à retenir et un exemple. Ou encore, la technique performative EAB (Evènement, Action, Bienfait). Soit, indiquer dans une réponse en une phrase, le moment opportun pour mener une action et les résultats escomptés. « Plus la réponse sera courte, plus elle sera efficace«.