Par Patrick Rasandi, Formateur Coach, Fondateur d’IPRH Consultants, coach certifié, membre du Bureau du Syndicat des Métiers du Coaching
La gentillesse est, selon vous, une force. Or au travail, elle se confond souvent avec la faiblesse…
La gentillesse est plus qu’une force : c’est une philosophie de vie et une ouverture sur le monde, un vecteur de relations et d’opportunités. C’est un état d’esprit permanent, contrairement à la bienveillance qui est plus ponctuelle. La gentillesse suppose d’être authentique et de vouloir le bien de l’autre. Dans l’entreprise, elle ouvre la voie à un plus grand confort moral… Le problème n’est pas la gentillesse, confondue à tort avec de la naïveté, mais les limites que l’on se fixe.
Le risque n’est-il pas de se faire manipuler ?
Il existe des manipulateurs, des personnes au caractère dominant, parfois toxique. Devant l’agression, fréquente en période de crise (plan social par exemple), la communication non violente et une bonne gestion de ses émotions permettent de faire face. Ensuite, il faut être conscient que si l’on dit « oui » à une demande, on dit « non » à soi-même. Oser dire « non » ne signifie pas être hostile à l’autre. Avant de dire non, il s’agit d’offrir une ouverture : si l’on répond par la négative, proposer une autre solution. Au-delà de la communication avec les autres, je recommande aussi de se réserver des rendez-vous pour soi, car la gentillesse suppose de s’aimer soi-même. Enfin, cela demande une lucidité concernant ses intentions, être sûr d’agir de façon désintéressée et ne pas avoir d’attentes cachées envers la personne que l’on vient d’aider.
Dans une société en crise, peut-on encore être gentil ?
C’est justement dans un contexte de chaos qu’il est nécessaire de tomber le masque. L’être humain naît gentil mais son histoire, la culture ou encore des événements extérieurs peuvent freiner cet élan : la personne sera alors en protection permanente pour se préserver. Durant la crise, il y a eu beaucoup d’exemples d’entraide et de solidarité, où les hommes ont osé révéler leur gentillesse de façon désintéressée.
Pour vous, c’est donc une compétence utile en entreprise…
Tout à fait, car la gentillesse permet de développer des softs skills telles que l’écoute, l’empathie, la créativité, la résilience, etc. Certes, le gentil s’expose à des déceptions mais qui viennent enrichir son expérience et s’avèrent bénéfiques sur le long terme. Avec la 4ème révolution industrielle, les métiers changent, exigent d’être adaptables. Les softs skills, corollaires de la gentillesse, aident à s’adapter, à devenir résilient. Il faudrait que les entreprises proposent à leurs collaborateurs des stages, non pas de gentillesse, mais plutôt de courage : celui d’être soi.
Quelques exemples de « gentils » qui ont réussi ?
Alain Bosseti, célèbre networker, dont les actes désintéressés ont permis de rebondir face à la crise de la Covid-19… Bob Burg, spécialiste de la vente aux États-Unis, qui a bâti sa fortune sur ses compétences et sa gentillesse. Gary Vaynerchuk, grand entrepreneur américain, ou encore Warren Buffet, connu pour sa gentillesse et sa générosité. Être gentil suppose de la force car il faut être équipé pour se protéger.