« Recherche d’emploi : laissez la panique aux autres. »
Par Patrick Rasandi, Fondateur et dirigeant d’IPRH Consultants, Formateur, coach senior certifié, Membre du Bureau du Syndicat des Métiers du Coaching.
Dans la quête d’un nouveau job, la panique représente un ennemi intérieur insidieux et sournois qui agit à bas bruit avec des effets dévastateurs. Ceux qui y cèdent perdent bien souvent leur lucidité, leur capacité d’action et donc leurs chances de succès. Ils sont pétrifiés comme le malheureux lapin noctambule hypnotisé par les phares d’une voiture fonçant droit sur lui pour le transformer, à l’insu de son plein gré, en tapis sanguinolent.
Or, la panique est précisément ce qu’il faut apprendre à dominer — ou du moins à contenir. Comme le disait avec justesse Thomas Jefferson : « Rien ne donne un plus grand avantage à un individu vis-à-vis d’un autre que de rester calme et imperturbable dans des circonstances difficiles. »
L’art de garder son calme
Une crise professionnelle révèle les tempéraments. Dans son ouvrage The Unthinkable: Who Survives When Disaster Strikes – And Why, la journaliste américaine Amanda Ripley démontre que face à une situation perçue comme dangereuse, la panique ne constitue pas une réponse marginale mais bien la norme. Et cette norme s’exprime par trois comportements instinctifs : fight (lutte), flight (fuite), ou freeze (tétanie). C’est ce troisième réflexe – la sidération – qui s’avère le plus courant… et le plus fatal.
L’auteure cite le témoignage d’un rescapé du naufrage du ferry Estonia en 1994. Alors que cet individu agissait de manière réfléchie pour survivre, il ne comprenait pas pourquoi tant d’autres passagers restaient cloués à leur siège, incapables de se lever ou de réagir. La panique, ici, ne se manifestait pas par une explosion de cris mais par un effondrement intérieur, une pétrification.
Ce que révèle ce type d’exemple, c’est que le sang-froid constitue une compétence de rebond et de survie. Et comme toute compétence, il convient de l’acquérir et/ou de la développer.
Rester maître de soi… pour rester maître du jeu
En recherche d’emploi, vous êtes scruté. Chaque mot, chaque geste, chaque attitude est analysé par votre entourage : amis, famille, anciens collègues, recruteurs, membres du Réseau. Vous ne vous en rendez peut-être pas compte, mais vous êtes en vitrine. Cette dernière reflète bien plus que votre parcours : elle traduit votre état d’esprit, vos peurs, vos espoirs et votre capacité de résilience.
Lorsque vous êtes en poste, vos qualités et défauts sont dilués dans l’activité de l’équipe et de l’entreprise. Mais lorsque vous vous trouvez en transition professionnelle, vous êtes seul et donc plus vulnérable. Le moindre soupçon d’instabilité émotionnelle peut faire douter de votre solidité. Or, le doute constitue l’ennemi numéro un de la recommandation Réseau comme de l’embauche.
Comme le disait l’écrivain William Faulkner :
« Aie peur – on ne peut pas échapper à la peur – mais ne la laisse pas transpirer. Personne dans la forêt ne te fera de mal à moins qu’il ne se sente lui-même traqué ou ne respire ta peur. »
Maîtriser ses émotions pour rassurer les autres
Même si vous ressentez une angoisse profonde, une incertitude écrasante, un sentiment de découragement, ne laissez rien paraître. Affichez un visage serein et parlez avec assurance, même si vous êtes intérieurement fébrile. Rassurez vos interlocuteurs, et donc, paradoxalement, rassurez-vous vous-même. Conserver une attitude calme ne s’assimile pas à de la dissimulation, cela consiste plutôt à adopter une stratégie émotionnelle gagnante. Personnellement, j’aime beaucoup cette citation de Warren Buffet qui s’applique parfaitement à la transition de carrière : « C’est quand la mer se retire que l’on voit ceux qui portent un maillot de bain ».
En vous plaçant dans une posture de maîtrise, vous activez un effet miroir positif : vos proches, vos contacts, vos interlocuteurs professionnels auront naturellement plus envie de vous épauler, de vous recommander et de vous accorder leur confiance. Car le Réseau est sélectif : il n’aide que les personnes qui paraissent solides, déterminées et sereines, c’est-à-dire les individus qui inspirent confiance. De même, les recruteurs ne retiennent que les candidats qui les convainquent et les rassurent.
Le calme : une compétence qui se cultive
Amanda Ripley insiste sur un point clé : savoir garder son calme et sa lucidité ne constitue pas un don réservé à quelques élus. C’est un travail intérieur, un entraînement mental. Il s’agit de programmer son cerveau pour que ce dernier sache réagir de façon adéquate dans les moments les plus difficiles. Cela passe par des mises en situation, une visualisation des scénarios envisageables et une préparation mentale afin d’affronter l’incertitude et le danger avec sérénité et lucidité. Autrement dit : ça s’apprend et cela se travaille. Le recours à un sophrologue peut être, dans certains cas, très utile.
Alors pourquoi ne pas appliquer cette logique à la recherche d’emploi ? Imaginez chaque rendez-vous Réseau, chaque entretien, comme un exercice de gestion du stress. Visualisez votre posture, votre voix, votre respiration. Entraînez-vous à incarner une saine assurance, même si, au début, cela vous demandera un effort. Au fil des jours et des semaines, cela deviendra une bonne habitude.
Ne vous trompez pas de combat
Afficher de la confiance en vous ne doit pas vous faire tomber dans un excès. En effet, lors de rendez-vous Réseau ou d’entretiens d’embauche, le dirigeant qui surjoue la confiance en lui peut rapidement paraître arrogant et insupportable pour la personne qui l’écoute. Cette attitude, souvent adoptée pour masquer un doute intérieur ou une réelle fébrilité, finit par trahir une forme de fragilité mal dissimulée. Elle crée un sentiment de malaise chez l’interlocuteur qui sent instinctivement un décalage entre le discours trop assuré et la réalité émotionnelle de la personne en face. Ce trop-plein d’assurance artificielle génère généralement de l’exaspération, de la méfiance, voire une forme de rejet. Il est donc essentiel de trouver le juste équilibre entre sérénité affichée et humilité sincère, car c’est souvent dans la lucidité tranquille et la capacité à reconnaître ses zones d’incertitude avec maturité que réside la vraie force.
En conclusion : soyez celui ou celle qui rassure
En recherche d’emploi, l’incertitude et l’instabilité constituent la norme. Dans ce cadre, la personne qui garde son sang-froid rassure, conforte et prend l’ascendant. Elle inspire confiance. Elle donne envie.
Et comme le résumait avec une lucidité, Franklin D. Roosevelt, confronté, en 1929, à une des pires tourmentes économiques de tous les temps :
« La seule chose que nous ayons à craindre, c’est la crainte elle-même. »
Alors, si vous êtes votre transition professionnelle, au lieu de céder à la panique… laissez-la à vos concurrents.
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Article BONUS / Conseil coaching rédigé par l’équipe d’IPRH Consultants !
Pour dépasser le prisme parfois réducteur du seul CV, de plus en plus de recruteurs n’hésitent plus à en limiter l’importance, voire à s’en passer. Nos conseils pour réussir vos entretiens d’embauche dans cette nouvelle ère du recrutement où l’authenticité prime sur le parcours.
« Comment briller lors d’un entretien de recrutement sans CV ? «
« Dans le contexte actuel de pénurie de talents, continuer de se focaliser uniquement sur le traditionnel CV réduit la capacité de recherche et d’identification des recruteurs, affirme Sylvain Robillard, directeur de Randstad Bretagne et adepte convaincu du recrutement sans CV.
« En France, nous restons encore attachés au sacro-saint CV, mais dépasser ce prisme permet d’ouvrir un champ des possibles beaucoup plus important et pousse à aller plus creuser l’aspect personnalité des candidats. Quand je fais passer des entretiens, je prends le CV et je le retourne, ce qui m’intéresse, c’est le candidat », note-t-il. En effet, si le CV est depuis quasi toujours un pilier et une base pour le recrutement, qui renseigne les informations sur le parcours professionnel du candidat, il reste souvent très évasif sur les savoir-être, et trop peu détaillé s’agissant du listing des compétences.
Soft skills vs diplômes
Le recrutement sans CV privilégie la rencontre spontanée, pour donner la même chance à tous les candidats de parler d’eux, de leur parcours, et surtout d’exprimer leur motivation et leur personnalité. De quoi faciliter la projection et un recrutement le plus pérenne possible, selon Sylvain Robillard : « L’objectif, c’est que le recrutement réussisse et dure. On s’aperçoit que ce qui fait que c’est le cas, c’est l’adéquation aux valeurs de l’entreprise et les liens humains entre collègues et avec son manager. L’approche sans CV apporte un niveau de connaissance qui permet de se projeter. »
Et pour cause, selon l’étude « Future of Jobs 2025 » du World Economic Forum, 95 % des recruteurs estiment que les soft skills sont tout aussi importantes, voir plus, que les hard skills et le cursus des candidats.
Des entretiens de recrutement sans CV
Depuis 2018, Randstad organise chaque année « Öppen » une vaste opération de recrutements sans CV en collaboration avec l’enseigne de bar à vins V and B. La dernière édition en date a eu lieu le 25 mars 2025, dans 28 villes sur tout le territoire, durant laquelle demandeurs d’emploi et recruteurs sont mis en relation, sans filtre et sans CV. L’entretien dure une dizaine de minutes, le recruteur ne dévoile ni le nom de son entreprise ni les postes pour lesquels elle recrute, tout est affaire de personnalité.
« Les candidats qui viennent ne savent pas quelles entreprises ils vont rencontrer, explique Sylvain Robillard. Ils peuvent tourner de table en table, pour se présenter, parler de leur motivation et montrer qui ils sont. » Autre particularité : les participants sont invités à passer le test des 16 personnalités en amont, et les entreprises à « traduire » leurs offres d’emploi selon les différentes personnalités, et le jour J, à afficher uniquement les profils de personnalités recherchés. « Sur le recrutement sans CV, il est vrai qu’on est à 80 % sur un premier niveau de qualification, et à 20 % de cadres, concède le directeur de Randstad Bretagne. Mais la tendance s’ouvre de plus en plus à tous les niveaux. »
Votre personnalité devient la clé de l’embauche
En dépassant le seul CV, qui peut être incomplet ou mal conçu, il s’agit également de ne pas passer à côté d’éventuelles compétences valorisables et très utiles. « L’approche en termes de compétences est très importante, mais elle peut être limitante si on ne se fit qu’au CV, affirme Sylvain Robillard. Si, en tant que recruteur, je recherche une compétence clé, je peux passer à côté d’un candidat qui ne l’aurait pas identifié et précisé dans son CV. Et idem s’agissant des compétences transversales ou qui découlent des loisirs ou des expériences personnelles, comme le fait d’avoir été capitaine dans des sports collectifs. D’où l’idée de se concentrer sur le candidat de A à Z, d’avoir cette démarche d’ouverture et d’écoute. »
Une démarche qui doit aussi permettre aux candidats de se projeter plus facilement dans leur futur poste, en créant tout de suite du lien avec le recruteur, et d’élargir leurs perspectives d’embauche. « Aujourd’hui, on raisonne en termes de compétences, et plus seulement en termes de métiers comme c’était le cas auparavant. Cette évolution du recrutement, et notamment l’émergence du sans CV, c’est un peu le sens de l’histoire. D’autant plus que les entreprises ont de plus en plus la capacité de former leurs nouvelles recrues, que ce soit en interne ou en externe », résume le directeur de zone chez Randstad.
Pour les curieux et les intéressés à l’idée de participer à une session de recrutement sans CV, selon Sylvain Robillard : « Le seul conseil, c’est de venir comme vous êtes, d’exprimer vos motivations, vos aspirations et votre personnalité sans jouer un personnage et en restant naturel. Il ne s’agit pas d’opposer les méthodes, mais d’affirmer que le sans CV permet des rapprocher des talents et des entreprises qui ne se seraient peut-être jamais rencontrés. » En bref, misez sur l’authenticité !